La noisette de Cervione

Alain Piras, Cervione

La noisette de Cervioni est connue dans toute la Corse.

Au début des années 2000, Alain Piras a décidé avec les producteur·rice·s de la commune de créer une association, l’associu A nuciola, pour mieux valoriser le fruit. Ils ont réussi à obtenir l’IGP (Indication géographique protégée) qui permet de lier la qualité de la noisette à son origine géographique. En 2017, l’association comptait 151 adhérents pour une production de 58 tonnes.

Âgé de 74 ans, Alain travaille encore dans la casserie. Il est le trésorier de l’association, il achète les noisettes des producteur·rice·s pour les trier et les casser avant de les revendre dans toute la Corse. Durant mon voyage, j’ai eu l’occasion de le rencontrer avec l’un de ses associés dans la casserie au pied de Cervione.

L'histoire des noisetiers de Cervione

Historiquement, il n’y avait pas de noisetiers en Corse, c’était des cédratiers. Il y a eu le gel pendant trois ans et ils sont tous morts. Les anciens ont planté des noisetiers et ça a très bien marché. C’est un arbre qui a besoin d’humidité. À cette période, il n’y avait pas d’irrigation comme il y a aujourd’hui donc ils ont planté les arbres dans le fond des vallons.

Dans les années soixante, on était les premiers producteurs de France de noisettes. Il n’y en avait pas ailleurs. Il y avait une forte demande, du coup tout le monde en plantait. Et sur le continent, ils ont fini par s’apercevoir que c’était intéressant, maintenant il y en a partout. Actuellement, on n’est plus les premiers producteurs, on est les derniers. Et là d’ailleurs cette année, les arbres ont beaucoup soufferts. Il y en a beaucoup qui sèchent à cause du manque d’humidité.

Extrait d'interview audio

Les vieux noisetiers immortels

Extrait d'interview audio

Les sangliers corses

Pourquoi la Corse ?

Ma mère était originaire de l’île. Moi je suis né en Afrique du Nord, mais mon père a été tué et donc on est revenu ici en 1961. Autrement je serai toujours en Afrique du Nord. Moi je ne connaissais même pas les noisettes quand je suis arrivé. J’étais pompier, mon beau-père était pompier, mon beau-fils est pompier, mon fils est pompier. Je le suis toujours, mais de manière résidentielle. Pour moi être pompier ce n’est pas un métier, c’est une vocation.

Pourquoi avoir créé l’association ?

Avant, les gens venaient du continent pour acheter les noisettes, mais seulement ils suivaient le coût mondial. Et ce coût, ce n’est pas nous qui le faisions, le tarif était géré principalement par la Turquie avec ses 700 mille tonnes. Donc il y avait des années où le cours était bon, c’était rentable et des années où il était mauvais : on gagnait de l’argent en laissant les noisettes par terre, ce n’était même pas la peine de les ramasser. 

Il faut savoir que nos vergers ne sont pas mécanisables, on doit tout faire à la main. Alors les gens les ont laissé tomber. Moi j’étais pompier et quand j’ai abandonné cette vocation, je me suis dit « qu’est-ce que je vais faire ? ». Avec les copains, on a pris les noiseraies à l’abandon. On les a remis en valeur, on a monté notre association pour ne pas être tributaire des gens qui venaient du continent et qui faisaient leurs prix. Grâce à l’association, on leur a donné une plus-value, et ça a marché.

La casserie

Voici deux petites vidéos qui montrent le fonctionnement des concasseurs et le tri des noisettes qui ont mal été cassées.

Tes noisettes sont réputées ?

Je les vends partout en Corse : à des pâtissier·ère·s, des chocolatier·ère·s, des glacier·ère·s… J’en distribue un peu sur le continent, mais pas beaucoup. D’ailleurs tous ceux qui font un produit avec nos noisettes le certifient sur leurs étiquettes.

Extrait d'interview audio

la noisette vedette

Parle-moi de l’IGP.

Nos noisettes sont les seules à avoir l’IGP en France. Du coup les gens plantent. Mais seulement ils vont à la plaine où c’est mécanisable. Ce n’est plus la peine de planter dans les endroits où c’était planté avant parce qu’il faut tout faire à la main et la main-d’œuvre est tellement chère que ça ne vaut plus le coût. Maintenant avec les machines, quelqu’un qui a une vingtaine d’hectares, il fait tout tout seul.

Bio par contrainte ? Y a-t-il des prédateurs ?

Même quand je n’étais pas en bio, je n’ai jamais mis d’engrais. Je ne vois pas pourquoi j’en mettrais. Mon terrain n’est pas compatible d’ailleurs, il faut venir avec des sacs sur le dos, ce n’est pas mécanisable dans les fonds des vallons. Il y a des endroits où on ne peut pas arriver en voiture, il faut y aller à pied.

Extrait d'interview audio

Les prédateurs n’existaient pas

Extrait d'interview audio

L’arrivée des punaises

On a une nouvelle maladie cette année, c’est une punaise qui pique les noisettes, autrement on en n’avait aucune. On sait ça depuis une dizaine de jours, c’est tout récent…

En plus c’est difficile à déceler, quand on regarde la noisette, la coque n’a rien. C’est l’amandon qui est touché.

Nous ici on les casse, mais ceux qui achetaient les noisettes et qui les vendaient en coque n’étaient pas au courant, c’est moi qui les ai prévenus. Pour le moment, je ne sais pas ce que l’on va faire.

Voici une vidéo où Alain nous montre les noisettes malades.

Un fin connaisseur

Impossible de blouser Alain ! 

Contact

Alain Piras | Associu A Nuciola
Route du Stade, Cervioni